Edition 2023.
Rencontre avec : CHRISTIAN et GILLES CURINIER, installés quartier Bizac depuis 1974.
Qui n’a pas un jour croisé sur nos petites routes cet « équipage » insolite ? Un cheval, une petite « carriole » et un homme qui conduit le tout ? Aujourd’hui nous allons lever un coin du voile en allant à la rencontre de Christian et de son fils Gilles.
L.C : Merci de nous accueillir pour parler de votre passion : l’attelage. Comment c’est arrivé ?
Ch. : Par hasard. Dans le club hippique où je montais à cheval (au Rouret) et qui enseignait aussi l’attelage, des copains m’ont demandé mon aide pour un concours dans le Gard. Ce fut une révélation ! Quelle ambiance ! Quel spectacle ! Exaltant !… Alors Je m’y suis mis. Fils et petit-fils d’agriculteurs ardéchois, je suis né dans une ferme parmi les chevaux, les bœufs que l’on attelait pour le travail. C’était comme un retour aux sources.
L.C : Il fallait du matériel ?
Ch. : Oui c’est là que j’ai commencé à construire mes premières voitures et à sortir en compétition amateurs. Jusqu’en 1990, où j’ai eu un grave accident en marathon lors d’un concours à Lyon. A l’époque Gilles avait 15 ans – cavalier dès l’âge de 10 ans – Il a pris la relève pour l’entrainement du cheval.
L.C : Et les concours ?
Ch. : Et bien il a passé rapidement ses « degrés » (examens de capacités) et il a démarré avec un petit cheval, tout en continuant ses études …
G : Oui et une fois rétabli mon père a poursuivi les compétitions jusqu’en 2017. C’est très sportif, vous savez ! Dur même car aujourd’hui tout a évolué vers plus de vitesse et de performance. Entrainement d’athlète pour le cheval et… pour le meneur !!
L.C : Donc quand on voit l’image bucolique de votre « équipage » sur les routes, vous ne partez pas en balade ?
G : Ah non ! Quand les gens nous saluent d’un « bonne promenade ! » on remercie mais ça nous fait sourire ! J’emporte un cardiofréquencemetre pour surveiller le cardiaque du cheval. Lors des « fractionnés courts » ou « fractionnés longs », comme en athlétisme, l’effort se fait dans le sable près de la rivière, pour la résistance. On entraine 2 chevaux, un jeune pour préparer les championnats du Monde de 2025 et un autre qui a déjà fait un championnat du Monde en Hongrie en 2019.
L.C : Quel est le rythme de l’entrainement ?
G : Environ 3 ou 4 sorties par semaine, sinon ils sont en paddock et rentrés en box pour la nuit.
L.C : Combien de compétions par an ?
G : Quelques internationaux et sinon des nationaux : 6 en tout seulement dans l’année.
L.C : Je vois sur votre palmarès que vous avez en 2007 été vice-champion du monde en Marathon au Danemark ! C’est une des épreuves ? Et comment ça s’est passé pendant la Covid ?
G : Oui c’est l’épreuve phare de ces concours et pour 2020 les autorités m’ont accordé une dérogation (pour travailler les chevaux) en tant que sportif de haut niveau.
L.C : En quoi consiste les épreuves ?
G : Elles se déroulent sur 5 jours. Le mercredi : contrôle Véto. Le jeudi et vendredi : le Dressage (beaucoup de participants !) le samedi : le Marathon (l’épreuve reine, très spectaculaire et la préférée du public) le dimanche : la Maniabilité (épreuve d’agilité) C’est un sacré challenge pour le cheval il doit être complet : calme en dressage, endurance et résistance physique en marathon et agilité en maniabilité. C’est l’entrainement qui donne ce résultat.
Il est à noter que nous sommes les seuls ardéchois, tant en national qu’en international, sur les terrains ! (rires)
L.C : Et l’esprit de compétition n’est pas trop pesant ?
G et Ch. : Ah pas du tout ! Car il n’y a pas d’argent en jeu ! Ça change tout, c’est la solidarité qui règne et si quelqu’un a un problème chacun est prêt à prêter une voiture, faire une soudure, recoudre un harnais, car on sait, tous, tout faire ! Et à la fin des internationaux alors là c’est la fête ! Un énorme banquet nous réunit autour des spécialités apportées par les concurrents de tous les pays ! Alors l’ambiance… je ne vous dis pas !
A cet instant apparait la fille de Gilles, Tizia, 12 ans avec un cheval en main.
G : c’est le papy de nos retraités : 35 ans et encore frais pour des balades. On en a un autre de 25 ans, Le sport les a conservés on dirait.
L.C : et toi Tizia, tu vas suivre la passion familiale ?
T : L’attelage, non pas pour l’instant ! Mais je fais déjà des compétitions d’obstacles.
L.C : Bon sang ne saurait mentir ! Merci pour ces instants et je vous souhaite toujours plus de belles aventures !
Interview : C.P.
Edition 2020
CHANTAL LEBRUN, ingénieur méthode, retraitée.
L.C vous habitez le village depuis 7 ans et vous êtes plutôt discrète. Je viens d’apprendre que vous avez été une pionnière dans le football féminin international ! Vous nous racontez ?
C.L Comme je le dis parfois ma chance ça a été de rater mon bac !! (Les jeunes n’écoutez pas !) L’histoire commence 2 ans plus tôt à l’été 1968 lorsque je tombe sur une petite annonce dans le journal l’Union de Reims où j’habite. Je suis sportive, championne d’académie en gymnastique. L’annonce tente de constituer « une équipe de foot féminine éphémère » pour se produire lors de la kermesse estivale du quotidien. Le but ? Que cette attraction leur attire du monde !!
L.C A l’époque les filles dans le foot, c’était pas courant ?
C.L Exact, mais ce sont 15 sportives de diverses disciplines qui se présentent à l’entraînement, toutes en excellente condition physique et avec des qualités techniques évidentes tant et si bien que d’attraction, ces jeunes filles sont devenues une vraie équipe capable en un mois de se produire en lever de rideau du match masculin Reims-Valenciennes, et de battre une équipe alsacienne aguerrie. Il faut savoir que la proximité de l’Allemagne très en avance alors pour le foot féminin leur permettait de participer aux rencontres féminines allemandes.
L.C Et c’est là que tout commence ?
L.C Oui ! Ce fut le début de 2 ans de voyages et de rencontres en Tchécoslovaquie, en Italie, en Angleterre pour s’achever pour ma part à l’été 70 (après avoir raté mon bac) par une tournée sur la côte Est des Etats-Unis, tournée organisée par une équipe italienne (Lazio-Roma) C’est au cours de cette tournée qu’il m’a été proposé de jouer à Rome.
L.C les italiens aussi étaient acquis au foot féminin ?
C.L Les italiens à cette époque bénéficiaient de 2 divisions féminines et nous parcourrions le pays chaque dimanche en bus dans des ambiances que je vous laisse deviner ! J’habitais avec une anglaise, une autrichienne, et Katia la sarde, grâce à laquelle j’ai pu apprendre un excellent italien mais aussi le romain populaire des terrains de foot. Bien qu’étant sans contrat, car je voulais garder ma liberté, j’ai pu ainsi passer 2 années sans problème matériel, à réfléchir au monde et à voyager avec cette équipe. Après une tournée d’un mois en Asie, matches en Indonésie, à Singapour et Bangkok, je suis rentrée en France et j’ai abandonné le foot.
L.C Pour passer à autre chose ?
C.L C’est une nouvelle opportunité qui s’est présentée alors avec l’ouverture de la faculté de Vincennes aux non-bacheliers, faculté où enseignait une de mes connaissances au département des sciences de l’éducation. Et après des petits boulots, vendanges, cueillette des fraises, femme de ménage et agent d’assurance… je voulais explorer d’autres domaines. J’y ai obtenu une licence d’italien et je me suis ensuite orientée vers la documentation option informatique.
L.C C’est un sacré virage !
C.L Ah oui ! J’ai alors fait la rencontre de Michel Authier et Pierre Lévy, promoteurs des « Arbres de Connaissance » utopie formidable engagée en 1992 sous la férule d’Edith Cresson et de Michel Serre.
C’est dans ce contexte que j’ai ensuite développé de nombreux projets d’intelligence collective en France mais aussi en Allemagne, en Espagne et surtout en Italie !! Quand je pense qu’au lycée je me croyais nulle en langues !
L.C Je vois là des photos de joueuses de foot aux cheveux gris ?
C.L Ah oui on s’est revue, celles de Reims, pour un bel article dans le journal l’équipe ! Il y a 50 ans toutes ces mamies ont été de vraies pionnières, elles ont ouvert la route aux championnes d’aujourd’hui.
L.C Votre parcours n’est pas banal ! C’est la démonstration que tout n’est pas déterminé par le scolaire, si l’on reste ouvert aux opportunités, qu’on les saisit et que l’on sait s’enrichir de toutes nos rencontres. La vie connaît son chemin… Merci Chantal pour cet entretien.
Interview : C. P